Bonjour, tristesse Chronique d’un automne 1

Il y a peu, on criait contre les talibans, qui empêchaient les musiciens de jouer, les gens de chanter. Ici, le virus joue leur rôle, fortifié par les crises sanitaires, économiques, sociales, politiques, qu’il a déclenchées, relayées dans le vaste monde entièremet délabré.

Les amis, les dîners en ville ou au restaurant, les sorties de musique, de théâtre, de cinéma, de foot, de tout : terminés. Emmanuel Macron hier parlait de quatre semaines puis de six, qu’il espérait obtenir. On relâchera sans doute un peu, le temps que les gens chantent Petit Papa Noël en dépensant leurs sous dans des cadeaux stupides - sans sapin, les écolos ayatollesques s’y opposent -, puis, sans doute, on resserrera la vis pour soigner les gastros des fêtards obéissants qui se seront bourrés de bûches à la crème au beurre.

Pour la Toussaint, on pourra aller en vacances : mais qui viendrait à Paris ou à Lille ou à Marseille etc. pour se cloîtrer à 9 heures sans voir quiconque ?

Je m’occupe de mes deux enveloppes de billets de concerts, de théâtres et d’opéras, que j’ai constituées depuis le mois de mars dernier : mon travail consiste à faire passer les billets de la première (spectacles prévus) à la deuxième (spectacles annulés). Je ne savais pas que j’aimais tant la musique, la vraie, la vivante, celle qu’on écoute, ensemble, dans une salle, jouée par des musiciens en « présentiel » comme on dit en novlangue. Sa disparition, sa réduction à des CD ou radio écoutés toute seule, pour moi, c’est la barbe, l’impression d’asphyxie, de la disparition d’un mode de vie.

Le Covid-19, avec ses effets physiques ou moraux, on en crève : plaisir, amis et spectacles, adieu ? Faut-il se résigner à métro, boulot, dodo, et ceci quand le couvre-feu ne vous supprime pas le boulot ? La vie est vite sinistre, réduite à éplucher 5 légumes et fruits par jour, pour quoi, pour faire vivre une souris dans son trou ? Surtout quand on est vieux, et qu’on se dit qu’on n’a plus le temps d’attendre que ça se rabiboche.

J’hésitais, ces derniers jours, à écrire mon mécontentement. À quoi bon mêler des constats amers sur la mort d’un mode de vie, la mort de la vie culturelle, la disparition des projets de plaisirs de sorties et de la présence nécessaire des amis. Pourtant, comment se taire quand la culture et la confiance du plaisir social sont en mort cérébrale, comme disait l’autre à juste titre (en parlant de l’OTAN).

Alors, finalement, « écrire, dit-elle », sur mon site, comme un caillou du Petit Poucet dans un triste temps. Comme au printemps.