Le roi Lear Mise en scène d’Olivier Py

Je suis allée un peu à reculons voir Le Roi Lear dont c’était la dernière, hier, aux Gémeaux à Sceaux : j’avais plus ou moins entendu les critiques lors de la présentation de la pièce cet été à Avignon. Une amie, professeur d’anglais, avait trouvé que la mise en scène d’Olivier Py, bruyante et agitée, avec des jeux et des détails inutiles, rendait assez mal un texte qu’elle connaît bien.

La pièce, réputée avoir été écrite par Shakespeare entre 1603 et 1606, est hors norme, - dimension, personnages, situations, alliances, relations de famille et de couple, le pouvoir, les préjugés sociaux, tout y est, je l’ai vue au moins 5 ou 6 fois dans ma vie et ici, je n’ai vu qu’un ennuyeux hachis.

Car, dans ces deux heures et demie (pièce réduite de près de la moitié) , je me suis ennuyée à mourir.
Les traits « modernes » - faire rouler Edmond sur une moto, mettre une couverture de survie dorée au « Pauvre Tom » sur la lande pour faire clignoter son anatomie supposée cachée, faire des allusions à 2015, comme si on était dans Retour vers le Futur -, étaient totalement inutiles.

J’ai trouvé un peu ringards ou naïfs certains partis-pris : l’envie collégienne de montrer des hommes à poil ; les grandes lettres en néon, en fond de scène, assénant une phrase ( Ton silence est une machine de guerre) rendue pesante et creuse par la constance de sa présence ; ou ce RIEN en mêmes lettres néon, qui donne envie de penser que oui, cette « mise en scène » n’est rien ; le déménagement laborieux et inutile du plateau pour le transformer en « lande » terreuse arrosée par une pauvre petite lance d’incendie en guise de tempête. Lourd, raté, petit ou braillard.

Je me demande, si on ne connaissait pas la pièce, comment on ne comprenait quoi que ce soit : ni les « structures élémentaires de la parenté » au XVIe siècle, ni les traits particuliers de chaque personnage de la famille de Lear, ni de la famille de Gloucester, ni les alliances, ni le rôle de Kent (qui était à peu près totalement gommé), ni les relations des deux couples avides et pervers formés par les filles aînées et leurs époux, à peine esquissés par de sots petits jeux de scène ; la part du fou était exagérée, - évidemment, quand on coupe tant dans le texte, on privilégie toujours une partie au détriment d’une autre : la pièce était parfois réduite à une farce d’ivrogne. Aucun des personnages n’avait son épaisseur propre, aucun relief personnel. Aucune émotion. Parfois pur Grand Guignol.

Il vaut mieux se rappeler, dans les mises en scène récentes, le très beau travail d’André Engel à l’Odéon Berthier en 2007, plein d’émotion, plein de beauté, plein de violence ressentie, avec Michel Piccoli ; celui de Christian Schiaretti, plus laborieux (je n’avais pas trop aimé Serge Merlin dans le rôle titre) mais fidèle au texte et au monde visuel du XVIe, au Théâtre de la Ville en 2014.

Le roi Lear d’Olivier Py est à oublier.